Luxembourg, 24 mai 1991

L’objet du présent rapport est de rendre compte à la Commission des Communautés Européennes des conclusions auxquelles a abouti l’Association Europe et Entreprises, au terme des travaux menés en son sein dans la perspective du colloque organisé, sous son égide, à Luxembourg le 24 Mai 1991 sur le thème : "La Qualité, élément decompétitivité".

 

L’Association tient à souligner, dès à présent, que la qualité a été envisagée sous un angle global en tant que nouvelle orientation donnée au management et à la conduite des entreprises, et dans la perspective du renforcement de la construction européenne. En effet, nous ne traitons pas spécifiquement des outils et des démarches de la qualité, mais nous les restituons dans leur contexte d’application qui leur en donne sens, efficacité et pertinence. Il n’est plus contestable que la qualité constitue l’un des fondements de la stratégie et de la conduite des entreprises et s’avère l’un des facteurs essentiels de performance. L’EUROPE représente dans cette optique un enjeu de la plus haute importance car c’est le plus grand marché solvable du monde et, qui plus est, un potentiel de développement considérable avec l’ouverture à l’Est. La non-Europe coûte cher et sa non-cohésion pourrait lui être fatale.

L’EUROPE présente des diversités extrêmes ; diversités que l’on retrouve dans les pays et les régions, entre les entreprises elles-mêmes, selon leurs activités ou leurs tailles, selon la position concurrentielle, selon la culture. Cette diversité est à la fois un facteur de richesse mais aussi un handicap car elle démontre souvent des faiblesses dans la stratégie, dans la maîtrise de nouveaux outils et concepts, par ignorance tout autant que par manque de moyens. Tel est souvent le cas des PME qui constituent une part essentielle du tissu économique européen. Nombre de PME sont essentiellement régionales ou nationales, elles devraient sans plus tarder adopter une vision et une visée européenne. Beaucoup d’entre elles ne pourront pas le faire, faute de moyens et/ou faute de savoir-faire. Il y a là un immense gisement de progrès que tous et tout le monde, entreprises, Etats, collectivités, particuliers ont intérêt à exploiter. D’où l’accent porté sur la nécessité pour les entreprises de pro-agir, c’est-à-dire d’être capable de lire dans les tendances présentes pour faire face au futur probable.

L’Association se propose donc de soumettre à la Commission des Communautés Européennes les onze propositions suivantes :

1. ELABORER UNE CHARTE EUROPEENNE DE LA QUALITE Pour un avantage concurrentiel européen. Elle définira un enjeu européen et précisera les axes de développement de la politique Qualité correspondante.

2. METTRE EN PLACE UN REFERENTIEL DE CERTIFICATION DES SYSTEMES D’ASSURANCE DE LA QUALITE COMMUN A L’ENSEMBLE DE L’EUROPE Situation actuelle : Chaque pays ne reconnait que ses systèmes de certification, quand encore ils existent. Les grands clients ne font encore confiance qu’à eux-mêmes en matière de système de gestion de la Qualité. Problème posé : Donner du crédit aux différents systèmes de certification (qui s’inspirent tous de l’ISO). Les grandes entreprises nationales sont les plus attachées à ne pas les reconnaître. Aider à développer la reconnaissance mutuelle des systèmes nationaux. Aller vers un certificat unique. Intérêt de la proposition : . supprimer une barrière aux échanges, . diminuer ou simplifier le nombre d’audits clients (et les surcoûts qu’ils impliquent), . donner une réalité à l’Europe de la Qualité.

3. DEFINIR ET PROMOUVOIR UN LABEL EUROPEEN POUR LA FORMATION MANAGEMENT - QUALITE L’ensemble des préceptes de la Charte Européenne de la Qualité trouvera son contenu éducatif dans ce label. Le but est d’en promouvoir une version unifiée en accord avec les orientations de la Charte. Une instance placée sous l’égide de la Fondation Européenne assurerait ce rôle et serait habilitée à décerner le label correspondant aux Ecoles et Universités européennes qui développeraient cet enseignement.

4. CREER UNE STRUCTURE "TRANSVERSALE" QUALITE A LA COMMISSION DES COMMUNAUTES EUROPEENNES Ce sera une véritable task-force de la Qualité
-  parce que la qualité comprend bien sûr la certification et les normes, mais va bien au- delà ;
-  parce qu’une politique de la qualité doit être mise en référence avec le projet dans lequel elle s’inscrit ;
-  parce que la qualité essentielle d’une démarche Qualité, c’est la cohérence ;
-  parce que la qualité, c’est un état d’esprit, un projet, des outils, des méthodes, un management. Elle doit être prise en compte par l’ensemble des structures spécialisées de la Commission pour en intégrer les composantes et orientations dans leurs travaux.

5. CREER UNE FONDATION EUROPEENNE DE LA QUALITE Elle sera l’instance qui gérera le prix Européen de la Qualité. Elle pourrait être issue notamment d’un partenariat entre : . la Commission, . les entreprises, . l’éducation. Elle pourrait mettre en place un système de bourse des expériences gagnantes ou de projets. Elle assurerait une veille "technologique" mondiale en matière de Qualité dont elle ferait bénéficier ses adhérents.

6. CREER UN PRIX EUROPEEN DE LA QUALITE SOUS L’EGIDE DE LA FONDATION EUROPEENNE DE LA QUALITE Situation actuelle : . il y a un prix de la Qualité au JAPON : Prix DEMING . il y a un prix de la Qualité aux USA : prix Malcolm BALDRIGE . il n’y a rien en EUROPE (tentative actuelle de l’EFQM) Problème posé : Le seul repère pour les entreprises européennes est la certification (type AFAQ) ou les homologations des grands clients. Il serait nécessaire d’avoir quelque chose de plus exceptionnel, plus exigeant, plus prestigieux, pour permettre de poursuivre dans la marche vers l’excellence.Intérêt de la proposition : Un prix européen de la Qualité à mettre en face des prix Japonais et Américain pour affirmer que la Qualité est aussi en Europe ; Ce prix et les exigences qu’il recouvre devrait constituer une ultime référence en matière d’intégration et d’application de toutes les composantes d’une politique Qualité. Une plus grande motivation à la Qualité en Europe ; Créer un style d’Entreprise de Qualité en Europe.

7. INSTAURER UN SYSTEME D’INITIATIVES COMMUNAUTAIRES A LA MISE EN PLACE DE DEMARCHES QUALITE DANS LES PME La Qualité étant considérée comme une priorité, comme pour les nouvelles technologies, tout effort d’investissement financier visant à développer la qualité dans une PME sera accompagné par un effort complémentaire de la Communauté Européenne.

8. FAVORISER LA CREATION D’ORGANISMES DE CONSEIL EN QUALITE POUR LES PME Les PME constituent une part essentielle du tissu économique Européen. Nombre d’entre elles ne pourront adopter une visée européenne faute de moyens et/ou de savoir. Il faut qu’elles puissent trouver dans leur environnement les outils et conseils adaptés à leurs besoins.

9. REALISER UN SYSTEME D’AGREMENT EUROPEEN DES ORGANISMES DE FORMATION CONTINUE A LA QUALITE Pour attester de la conformité des enseignements à une charte de fonctionnement de la profession dans le but de moraliser les pratiques.

10. PRECONISER LA MISE EN PLACE DE L’ENSEIGNEMENT DE LA QUALITE DANS LES FORMATIONS INITIALES Tous les niveaux d’enseignement seront concernés : public ou privé, élémentaire, secondaire ou supérieur. Une mission européenne assurera l’état des lieux et les propositions pour stimuler et harmoniser les enseignements de la Qualité. Pour assurer au concept de la Qualité un développement à long terme, l’A.E.E préconise un rapprochement entre le monde de l’entreprise et celui de l’université, écoles d’ingénieurs et commerciales, pour que ce concept fasse partie des programmes d’enseignement au même titre que le management.

11. INSTAURER UN FONDS POUR CONSTITUER UNE DOCUMENTATION PEDAGOGIQUE A partir d’expériences des entreprises, cette documentation serait basée sur la rédaction de cas- qualité et la présentation d’outils et méthodes mis au point par les entreprises.